La violente colère manifestée au printemps dernier à l’occasion de la réforme des retraites, bien que passée, n’est pour autant ni oubliée ni apaisée à cette heure. Les sujets de discorde et de mécontentement vis à vis des gouvernants et les dossiers qu’ils ouvrent invitent à la méfiance et n’appellent toujours pas à la concorde. Cela s’est constaté lors des dernières manifestations d’octobre, où les retraités étaient bien présents autours de leurs organisations syndicales, et l’Unsa retraités en ce qui nous concerne.
Les annonces effectuées récemment, avec grand brio auprès des médias, d’une revalorisation exceptionnelle des pensions à hauteur de 5,2 % sont loin, contrairement à ce qui a été déclaré, de suffire pour couvrir la perte de pouvoir d’achat constatée après une inflation galopante .Nous gardons en mémoire les pics de cette inflation , dépassant les 6% il y a encore quelques semaines voire connaissant des envolées à 2 chiffres, pour certains produits de première nécessité comme l’alimentation .
S’agissant des seniors, les promesses lancées au printemps 2022 : loi sur le grand âge, revalorisation des pensions, primes adapt, aides aux Ehpad …….à défaut d’avoir été gommées, ont tout simplement été suspendues pour être éventuellement resservies et rafraichies en 2027.
Certes les problèmes économiques, sanitaires mais aussi diplomatiques et guerriers rencontrés ces derniers temps au niveau planétaire, justifient l’attention qu’y ont porté les pouvoirs publics, mais ils ne les dédouanent pas de leur négligence à l’égard des retraités et en particulier de leur pouvoir d’achat. Nous en tirons pour preuve, la dernière mesquinerie de nos dirigeants ; en effet les retraités qui percevaient jusqu’alors des chèques vacances et pouvaient profiter d’une prise en charge partielle des frais liés à leurs congés ont vu cet avantage être supprimé dès le 1er octobre 2023.
Lors de son 7ème congrès national à Paris les 24 et 25 janvier derniers après avoir déclaré solennellement que le retraité était un citoyen à part entière mais également un citoyen européen, l’ Unsa retraités revendiquait à ce niveau un droit à la dignité. A l’issue des débats, elle a approuvé une résolution générale s’articulant autour de sept thèmes dont le premier était l’amélioration du pouvoir d’achat, en ces termes : « L’objectif demeure possible, tout en préservant le système de retraite par répartition et en assurant la pérennité du financement des retraites. Pour ce faire l’Unsa retraités propose et revendique un soutien à l’économie sociale et solidaire et l’instauration de plusieurs mesures fiscales dont au bénéfice des retraités : une fiscalité plus redistributive avec un impôt sur le revenu plus progressif, une exonération fiscale de la totalité de la CSG et bien évidemment une révision de la fiscalité des successions visant également les pensions de réversion.
La résolution générale maintien sa revendication d’une revalorisation des pensions calculée en fonction de l’évolution du salaire mensuel de base des actifs et au moins égale à l’augmentation de l’indice des prix constatée au cours de l’année, incluant une mesure de réajustement intermédiaire au 1er juillet en cas d’inflation supérieure à 2%. »
Presqu’une année après la tenue de ce congrès, la satisfaction de cette revendication, d’urgente devient cruciale, pour le garantie tout simplement d’une vie décente d’un pourcentage non négligeable des séniors.
Le « Mag du senior » (publication d’Ouest de France) a relevé au mois de mai dernier que « Comme pour le reste de la population, la hausse des prix, et en particulier ceux de l’alimentation (plus de 13 % d’augmentation en un an) et de l’énergie (gaz, électricité, carburant, etc.), impacte aussi le pouvoir d’achat des retraités puisqu’il s’agit des deux postes de dépenses qui pèsent le plus dans le budget des ménages.
Selon l’étude de Silver Alliance, les retraités interrogés estiment que leurs dépenses ont augmenté de 16 % en un an.
De son coté, dans une étude récente, l’Insee a souligné que la baisse de pouvoir d’achat touchant les retraités de plus de 75 ans et les plus modestes d’entre eux, (hormis ceux propriétaires de leur logement) avait pour conséquence de les placer en dessous du niveau de vie médian de l’ensemble de la population.
En dépit des dernières revalorisations des pensions, et compte tenu de leur insuffisance, l’importante inflation actuelle prive nombreux retraités aujourd’hui de la possibilité de compenser l’augmentation de leurs dépenses due à la hausse des prix . Selon l’enquête menée par Silver Alliance citée plus haut, les retraités estiment «qu’il leur manque en moyenne 511 euros par mois pour passer une retraite confortable».
Autre phénomène, relevé par cette étude, aggravant la situation des retraités en général : Une partie d’entre eux est de plus en plus amenée aussi à participer aux dépenses de type loyer, alimentation, carburant, etc., de leurs enfants et petits-enfants dont le budget connait aussi une baisse en raison du contexte inflationniste.
Compte tenu de la baisse de leur pouvoir d’achat, les retraités concernés limitent de plus en plus leur train de vie en ne pratiquant plus, par exemple, certaines de leurs activités de loisirs, mais aussi leur épargne, alors que cette population est celle qui met le plus d’argent de côté, ce qui fait dire au dirigeant de Silver Alliance que «Ces signes confirment un sentiment partagé par l’ensemble des Français aujourd’hui et présagent des difficultés à venir pour l’économie française sur le long terme. Car qui n’épargne plus, ne se projette plus».
De son côté, l’Unsa retraités, dans sa lettre info du mois de septembre dernier apportait ces précisions : « Avec une forte augmentation des produits alimentaires (+ 11,1%) et de l’énergie (+ 6.8%), un patron de la grande distribution constate un tsunami de déconsommation. Quant à lui, le baromètre annuel du Secours Populaire signale qu’un Français sur trois (32%) n’est pas en capacité de se procurer tous les jours une alimentation saine en quantité suffisante pour manger trois repas par jour. Au nombre de ces personnes en détresse, près de 1.5 million de retraités qui vivent sous le seuil de pauvreté…
Cerise sur le gâteau, rappelle l’ Unsa retraités, la rémunération du livret A, souvent seul produit d’épargne des plus modestes, est plafonnée pour 3 ans à 3 % soit près de deux points de moins que l’inflation. Quand on sait que le dépôt moyen sur ces livrets s’élève à 7300 euros, c’est un moyen commode de se servir dans la poche des petites gens pour tenter de restaurer un peu l’équilibre des comptes publics.
Une réunion de l’inter syndicale de retraités au niveau national s’est tenue le 15 septembre dans les locaux de l’UNSA à Bagnolet. Cette rencontre était à l’initiative de l’UNSA Retraités.
Étaient présents les représentants des confédérations de retraités suivantes – CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, et CFTC. La FGR-FP a décliné l’invitation. La FSU était absente.
Le premier point de l’ordre du jour était la préparation de la réunion de l’exécutif du 25 octobre de la FERPA.
À l’unanimité, les organisations ont souhaité que la question du pouvoir d’achat, notamment dans ce contexte de forte inflation, et celle de la pension minimale européenne soient à l’ordre du jour. Le positionnement politique de la FERPA est déjà acté dans son manifeste de 2022 et repris dans les revendications du congrès de 2023. Il est maintenant nécessaire de travailler sur la mise en œuvre avec la CES.
Ensuite, l’UNSA Retraités a lancé la discussion sur les possibilités de regroupement national des organisations françaises sur un sujet transverse telle la revalorisation des pensions. En effet, il apparaît que les positionnements soient similaires.
CGT, FO, CGC et CFTC ne souhaitent pas donner suite à cette proposition, estimant que le cadre de l’inter-UCR doit se limiter à traiter les questions du niveau européen. Ces organisations souhaitent traiter ces sujets uniquement au sein du groupement G9 (Groupe des 9).
La CFDT n’a pas donné suite non plus à la proposition de l’UNSA.( extraits de la lettre info de l’ unsa retraités N° 110 )
En conclusion, je ne peux m’empêcher de reprendre celle du rapport d’orientation du dernier congrès national de l’ Unsa retraités :
« Le combat syndical ne s’arrête pas le jour de la retraite car les retraités sont menacés dans leurs acquis et ont de plus en plus de difficultés à maintenir leur qualité et niveau de vie. Il importe de convaincre les adhérents de rester à l’UNSA après leur départ en retraite Les plus de 17 millions de retraités représentent une force. Les améliorations qu’ils ont obtenues sont le résultat des actions collectives qu’ils ont conduites, en suivant la trace de celles et ceux qui les ont précédés. Leur mobilisation est indispensable pour être force de propositions et agir pour améliorer leurs conditions de vie et préserver leur pouvoir d’achat. »
Patrick Lebrun
Secrétaire national de la section retraités de l’Unsa Services judiciaires